« Je ne crois pas qu’il faille chercher à avoir une grande vie ou un grand destin. Il faut essayer d’être juste ».
Genevieve de Gaulle est née en 1920 , dans le Gard. Fille de Germaine et Xavier de Gaulle, et nièce du Général de Gaulle, elle perd sa maman à 4 ans et demi. Le soir, avec sa sur et son frère, elle entoure son père pour faire la prière : « On priait pour des gens qu’on connaissait, pour des gens qu’on ne connaissait pas. On priait maman
on priait tout simplement . »
Jeune étudiante en histoire, elle s’engage dans la Résistance en 1940 sous le nom de Germaine Lecomte. Elle est arrêtée en 1943, emprisonnée à Fresnes puis déportée au camp de Ravensbrück.
Au lendemain de la guerre, elle épouse Bernard Anthonioz.
A partir de 1958, son deuxième combat est celui de son engagement auprès des plus pauvres au sein de ce qui deviendra l’association « Aide à toute détresse » (ATD quart monde). Elle en devient la présidente en 1964 et y militera jusqu’à la fin de sa vie.
Elle meurt le 24 octobre 2001.
Nous vous proposons de méditer :
-avec des extraits de son témoignage de déportée,
-avec une réflexion sur le sens de son engagement à ATD quart monde.
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Toutes les citations sont extraites de l’ouvrage Geneviève De Gaulle – Anthonioz de Caroline Glorion, Plon, 1997
Résister pour refuser l’inacceptable
« Je fus déportée à Ravensbrück dans un convoi de mille femmes, issues de tous milieux, de toutes convictions politiques
Nous avions une chose en commun : avoir à un moment de notre vie refusé l’inacceptable »
« Ce qui était inacceptable c’était l’humiliation, la lâcheté, c’était le fait qu’on ne se battait pas, qu’on prenait le parti de se soumettre. »
«Je me suis sûrement rendu compte, déjà à ce moment là, qu’on n’est jamais plus humain que lorsqu’on a lutté. Déjà je n’acceptais pas la fatalité. »
Pour moi, aujourd’hui, dans ce que je vis et tout ce qui m’entoure, qu’est-ce que « l’inacceptable ? » A la place qui est la mienne, pour quoi et comment ai-je envie de résister ?
Je peux faire mémoire d’événements où il m’a été donné le désir, la volonté, le courage de refuser la fatalité.
« A Ravensbrück, j’ai connu le pire et le meilleur, la fraternité absolue, la solidarité. »
« Nous étions très liées, lorsque l’une de nous lâchait, n’avait plus de force pour réagir, les autres prenaient le relais. »
« J’ai décrit souvent les visages des nazis que la haine et la volonté de faire du mal avaient marqué si cruellement , mais il y avait aussi en face, et peut-être encore bien plus présents, ces visages admirables. Finalement, avec mes camarades de déportation, nous avons une grande foi dans l’homme parce que nous savons qu’il y a des gens qu’on n’arrive pas à détruire et qui resteront des lumières our chacun de nous. »
Au cur même de la barbarie et de la plus grande souffrance, il y a eu place pour la vie, la main tendue, le partage.Et moi, est-ce que je crois à cette force de l’amour et de la vie, quelles que soient les circonstances ?
Je peux demander au Seigneur la grâce de faire confiance à l’autre, à moi-même, la grâce de croire qu’il existe toujours un chemin de bonheur.
Résister pour refuser l’humiliation et l’indignité
« Aujourd’hui encore, l’inacceptable est à notre porte, le racisme, la torture, la misère. J’ai retrouvé cette misère juste après la guerre dans les bidonvilles de Noisy-le-Grand où j’ai croisé les regards détruits de ces gens vivants dans des conditions matérielles insupportables. »
« L’expression que je lisais sur leurs visages était celle que j’avais lue bien longtemps sur les visages de mes camarades de déportation. Je lisais l’humilation et le désespoir d’un être humain qui lutte pour conserver sa dignité. »
Refuser cet asservissement et ce désespoir et affirmer que les hommes sont toujours en capacité de devenir, les vouloir debouts et libres, tel est le sens du combat que Genevieve de Gaulle a mené au sein d’ATD quart monde .
Il ne s’agissait pas d’assister le pauvre, mais de lui donner les moyens de se remettre debout par lui-même , en d’autres termes le respecter, l’aimer.
Le père Wrésinski « nous a empêchées de devenir ce qu’on appelait des dames d’uvres. Il nous a empêchées de venir nous pencher sur la pauvreté, donner notre obole, notre petit présent. Il nous a montré un autre chemin :sortir à tout prix de l’assistance qui maintient les pauvres dans un état de dépendance. Il a tout simplement fait entrer ce souci des plus pauvres dans nos vies. »
Et moi ? Quelle place le pauvre tient-il dans ma vie ?
Ai-je toujours le souci, la délicatesse de l’aider sans l’écraser ?
Comment puis-je me mettre à son service ?
Quel est le pauvre qui vit à mes côtés ?