Le jour où avec toute l’Église nous célébrons l’Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie, voici qu’est proposé à notre contemplation le chapitre 12 du livre de l’Apocalypse.
Voir aussi :
L’Assomption, l’amour vainqueur
L’entrée de Marie dans la gloire de Dieu
La Vierge Marie à la Visitation
Certes, dans l’esprit de bien des gens l’évocation de ce seul mot – “Apocalypse” – met tout de suite en marche les imaginations les plus délirantes. Pourtant nous devons recevoir ce texte (Apocalype 12) comme une fresque à contempler et ce chapitre se présente à nous comme une immense tapisserie, je pense particulièrement à celle que Jean Lurçat a réalisée dans l’église du plateau d’Assy.
L’Apocalypse nous révèle avant tout le mystère de Jésus dans le ciel, le mystère de l’incarnation dans le coeur de Dieu. « Le Temple de Dieu dans le ciel s’ouvrit, l’arche d’Alliance apparut dans son Temple » : L’arche d’alliance était appelée dans le premier Testament « la Tente de la Rencontre, la Tente du Rendez-vous » voici que désormais, par Jésus, le Temple est ouvert, l’arche céleste est dévoilée, l’alliance définitive voulue par le Seigneur est en train de s’accomplir, le temps de la réconciliation totale entre Dieu et l’homme est venu. Dieu lui-même vient rencontrer sa création. Il vient nu et dépouillé comme un enfant. Il se fait l’un de nous en acceptant de naître d’une femme, et de quelle femme ! « Alors un signe grandiose apparut dans le ciel… une femme ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds et sur la tête une couronne de 12 étoiles »…
En elle, la femme rassemble tous les luminaires, en elle, se réalise la vision d’ Isaïe : « Ton soleil ne se couchera plus , la lune ne disparaîtra plus » Is 20, 20. En elle, brillent ensemble la lumière éblouissante du soleil, l’éclat argenté de la lune et le scintillement des étoiles. Ces astres qui si souvent ont été ou sont encore idolâtrés ne sont ici que parure, vêtement, couronne, escabeau… Ils ne scandent plus l’alternance des jours et des nuits, ils ne scandent plus le rythme du temps car le temps a disparu et voici qu’avec la femme, nous sommes entrés dans une ère nouvelle, dans un jour sans fin.
Mais « qui est celle-ci qui surgit comme l’aurore, belle comme la lune » demande le cantique (ct. 6 ) ? On peut voir dans cette femme l’Ève Nouvelle, la véritable mère des vivants qui écrase la tête de l’antique serpent. L’Ève nouvelle qui engendre le Vivant par excellence. Cette femme couronnée de 12 étoiles, c’est la fille de Sion, c’est l’Église. C’est Marie, mère de Jésus, Marie de qui Dieu reçoit son humanité. Mais plus qu’à Bethléem, c’est au pied de la croix que Marie avec la première communauté engendre son Fils.
Ce passage de l’Apocalypse fait songer aux paroles de Jésus rapportées par Jean : La femme sur le point d’accoucher s’attriste parce que son heure est venue… : “Vous aussi maintenant vous êtes tristes mais je vous reverrai et votre coeur se réjouira” (Jn 16, 19-22).
Nous voyons enfin cet enfant à peine né et déjà enlevé près de Dieu et de son trône. Dans ce texte de l’Apocalypse, tout paraît être appréhendé en même temps : incarnation, résurrection, ascension ne semblent ne faire qu’un. A travers les souffrances de la femme, on peut percevoir le gémissement de la création tout entière en proie aux douleurs de l’enfantement et qui attend avec impatience la révélation des fils de Dieu.
Tout se précipite alors: Satan est chassé du ciel tout comme Adam l’avait été du jardin d’Eden, du paradis, l’enfant est enlevé… c’est alors qu’éclate le message central de toute l’Écriture : le Christ a vaincu, Satan est tombé. Si ce dernier peut encore sévir, diviser, accuser, égarer, il ne le peut que sur terre, dans le domaine du “passager”. Satan est banni du ciel, le salut ne peut être remis en question.
Au centre de la fresque : une femme, un enfant, un dragon. Au centre de l’histoire de l’humanité : un enfant, né d’une femme, vient nous sauver. La vision de l’Apocalypse est une annonce prophétique de ce qui se passe vraiment dans l’histoire du monde : Dieu sauve, Dieu glorifie. Dieu glorifie son humble servante, il renverse les puissants de leur trône, il élève les humbles… Ce passage de l’Apocalypse nous délivre en quelque sorte ce même message que celui du Cantique de Marie : Dieu a glorifié son humble servante.
Celui qui a glorifié son Fils, celui qui a glorifié son humble servante, celui-là même nous glorifiera nous aussi. Regarder Jésus, regarder Marie, la contempler, c’est voir notre propre destin. Regarder Marie c’est nous laisser transformer par sa lumière. Regarder la femme que nous présente l’Apocalypse c’est regarder la Mère des Vivants qui donne au monde le Sauveur. C’est regarder celle qui écrase le serpent. Oui, heureuse es-tu Marie, car tu as accueilli le Verbe de Dieu, heureuse es-tu car par ton OUI, écho de celui de ton Fils, la joie et le salut sont entrés dans le monde. “Toutes les générations te proclameront bienheureuse.”
Puisse la nôtre te chanter et reconnaître que celui qui t’a comblée de sa grâce. Il veut désormais nous faire partager, à nous aussi, sa gloire, celle qu’Il tient de son Père, lui, plein de grâce et de vérité.
Catéchèse de Mgr Aubertin