Le calendrier liturgique propose, au mois de novembre, de fêter la Dédicace des Basiliques romaines, du Latran dédiée aux deux Saints Jean, Saint Jean Baptiste et Saint Jean l’Apôtre, le 9 novembre, de Saint Pierre du Vatican et de Saint-Paul-hors-les-Murs, conjointement le 18 novembre. La quatrième Basilique romaine est Sainte Marie Majeure dont on fête la Dédicace le 5 août !
Qu’est-ce que la Dédicace d’une église ? Et pourquoi la Dédicace des Basiliques romaines est-elle fêtée si solennellement par l’Eglise toute entière ? Du point de vue spirituel, expliquait le pape Benoît XVI, « la fête de la Dédicace célèbre un mystère toujours plus actuel : Dieu veut nous édifier dans le monde en temple spirituel, en communauté qui l’adore en esprit et vérité (cf. Jn 4, 23-24)… Mais cette fête nous rappelle aussi”, a-t-il-dit, “l’importance des édifices matériels, dans lesquels les communautés se rassemblent pour célébrer les louanges de Dieu ».
Pourquoi célébrer la dédicace de la basilique romaine Saint-Jean de Latran érigée au début du 4e siècle ? Cette église patriarcale constitue le siège (cathédra) épiscopal de Rome. Elle est regardée depuis toujours comme la « mère et la maîtresse » des églises. A l’occasion du concile convoqué par le pape Miltiade pour condamner Donat et ses partisans, comme on ne trouvait de lieu assez vaste pour accueillir les évêques d’Italie, d’Afrique, d’Orient et de Gaule, le pape sollicita l’hospitalité de l’impératrice dont le palais était sis sur la colline Coelius. Au 9e siècle, le Latran fut témoin du procès sacrilège intenté au pape Formose par son successeur, puis détruit ou presque par un gigantesque tremblement de terre. L’anarchie régnait au Latran, les ruines de la basilique étaient envahies par les mauvaises herbes et le silence avait repris ses droits : on ne célébrait plus d’offices dans la célèbre basilique. Mais ces épreuves ne purent effacer de l’histoire ecclésiastique la place de toute première importance qu’occupa toujours la basilique patriarcale du Latran.
Sans doute, la foi de l’Église ne s’incarne point dans une construction matérielle, mais dans la vie des croyants : « Pierres vivantes …» ; mais la permanence n’est pas chose superflue ou désuète. L’Eglise est comme la source de trois Temples spirituels reconnus par la Révélation, disons un seul Temple aux trois aspects complémentaires : le corps glorifié du Seigneur, l’Église et le chrétien, temple de l’Esprit saint.
Corps glorifié du Seigneur
« Détruisez ce temple ; en trois jours de le relèverai ». Parole prophétique de Jésus prononcée la veille de sa mort et de sa résurrection. A la droite du Père, il sera l’homme parfait, lieu de toute gloire, dans une chair transfigurée. Là, dans cette chair transfigurée par la beauté et la grandeur de Dieu, retentit le chant de la création toute entière, des générations humaines et des événements de toutes les existences. En ce temple réside le secret non seulement de toute vie chrétienne mais de la création tout entière qui attend la révélation des enfants de Dieu.
L’Église
« En lui, toute construction s’ajuste et grandit en un temple saint dans le Seigneur ; en lui, vous aussi, vous êtes intégrés à la construction pour devenir une demeure de Dieu, dans l’Esprit ». (Eph 2 : 21) : le Christ, c’est l’Église appelée Temple, sanctuaire sacro-saint, sans tache ni rides ni rien de tel (Ep.5 : 27). Corps glorifié du Christ, l’assemblée de tous les rachetés constituent sinon une véritable identité, du moins une mutuelle convenance. Construit pour la gloire de Dieu, un temple n’en est pas moins consacré à l’usage des croyants, un peuple groupé, un ensemble sans cesse travaillé par les pasteurs, les missionnaires, les frères et sœurs oeuvrant sous toutes les latitudes, associés au Christ et mus par son Esprit. Ce Temple non-fait-de-main-d’homme exige le don et le travail de chacun. La main de Dieu cherche celle de l’homme pour achever l’œuvre et réaliser le Temple-église.
Chrétien, temple de l’Esprit
« Approchez-vous de lui, la pierre vivante rejetée par les hommes, mais choisie, précieuse auprès de Dieu. Vous-même comme pierres vivantes, prêtez-vous à l’édification d’un édifice spirituel pour un sacerdoce saint, en vue d’offrir des sacrifices agréables à Dieu par Jésus Christ » (1 Pi. 2 : 4-6) Et l’apôtre Paul d’écrire : « Ne savez-vous pas que vous êtes un temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous… Savez-vous que votre corps est un temple du Saint-Esprit, qui est en vous et que vous tenez de Dieu ? » (1 Co. 3 : 16 et 6 : 19 ) Pierres vivantes que nous sommes, chacune n’est pas seulement partie d’un tout, l’Église, mais chacune forme son propre monde, directement rattaché au mystère du Christ et en prise directe sur lui. Chacun de nous est temple, non seulement du fait qu’il appartient à l’Église entière, mais chacun dans l’enclos de sa personne est Temple, reposoir des personnes divines, amorce du corps ressuscité du Christ, mystère d’intimité.
Conclusion
Corps glorifié du Christ, Église totale, chrétien sanctifié, impossible de dissocier ces trois réalités. Le Temple signifie, célèbre et intègre le Christ, l’Église et les chrétiens. Le Temple évoque le mystère de la présence : Où qu’il soit érigé le Temple c’est Dieu présent, la création définit son lieu :« Un jour en tes parvis en vaut mille et j’ai choisi : le seuil de la maison de mon Dieu plutôt que la tente de l’impie » (Ps. 84 :1-6). Le Temple constitue de lieu de dialogue : un Dieu qui parle et à qui l’on parle ; lieu privilégié de colloque entre Dieu et l’homme. « Sois attentif à la prière et à la supplication que ton serviteur fait aujourd’hui devant toi ! Que tes yeux soient ouverts jour et nuit sur cette maison, le lieu dont tu as dit : « Mon nom sera là » Écoute la prière que ton serviteur fera en ce lieu. « 1 R. 8 :27-29).