De nombreuses valeurs véhiculées par le deuxième volet du Seigneur des Anneaux ne sont pas étrangères au message chrétien. Le Seigneur des Anneaux insiste sur la nécessité de résister au mal en tenant toujours en éveil sa conscience et en acquérant la vertu de force.
Suite aux événements qui entourent la réapparition de l’Anneau, Frodo prend conscience qu’il devra abandonner sa vie tranquille pour une aventure dangereuse. Sans se sentir obligé ou prédestiné à l’entreprendre, le choix s’impose à lui sans qu’il puisse se dérober à la nécessité de prendre parti. La situation dans laquelle se trouve Frodo est celle de tout homme qui, même s’il n’est pas appelé à vivre de grandes choses, doit exercer sa liberté sans renoncer à choisir entre le bien et le mal.
Le Seigneur des Anneaux insiste sur l’idée du devoir accepté purement et simplement, malgré nous en quelque sorte, malgré notre désir de ne pas quitter le confort d’une existence sans choix et sans décision. Pour cela, il faut du courage ou, plus précisément, de la force pour trouver dans les difficultés la fermeté et la constance dans la poursuite du bien.
Il ne s’agit pas pour les héros de Tolkien d’être les plus forts mais de persévérer même et surtout lorsque l’accomplissement de leur devoir est pénible et dangereux. La philosophe Irène Fernandez explique, dans un petit livre fort instructif, que Le Seigneur des Anneaux est très influencé par la théorie du courage illustrée dans les anciennes littératures scandinaves. Dans les mythes du Nord, les dieux qui partent en lutte contre les forces du chaos, représentées mythiquement par les monstres, sont voués à la défaite, au fameux crépuscule des dieux . C’est-à-dire que leur force ne s’exerce pas dans l’espoir d’une victoire immédiate, comme dans le cas d’une bataille militaire par exemple, mais pour elle-même en quelque sorte.
Une telle vision de la force rejoint la définition qu’en donne le Catéchisme de l’Eglise Catholique, qui la définit comme une vertu : La vertu de force rend capable de vaincre la peur, même de la mort, d’affronter l’épreuve et les persécutions. Elle dispose à aller jusqu’au renoncement et au sacrifice de sa vie pour défendre une juste cause. (§1808) C’est ce que dit en substance le personnage de Gandalf quand il déclare : Il y a des choses qu’il faut mieux entreprendre que refuser, même si la fin en est sombre. (III,2)
Evidemment, la vertu de force doit être éclairée par la vertu de prudence, qui dispose notre raison pratique à discerner, en toute circonstance notre véritable bien et à choisir les justes moyens de l’accomplir (§1835), mais elle n’en est pas moins fondamentale et les héros de Tolkien n’en manquent pas. Frodo par exemple, conscient de sa faiblesse ( Je me sens très petit I,2) emploie une formule qui résume à elle seule ce qu’est la force, envisagée comme une disposition particulière à faire le bien : Je peux parce que je dois. (VI,3).