La Passion a inspiré et continue à inspirer de nombreux poètes. La Mort et la Résurrection du Christ les touchent, leur parlent et les rejoignent dans leur expérience personnelle. Agrippa d’Aubigné chante la Résurrection de la Chair.
Agrippa d’Aubigné, chante avec les mots du XVIème siècle, la Résurrection de la Chair. ” Corps nouveaux ” et ” nouvelles faces ” peuplent une nature transfigurée par l’audace étonnante d’une vie nouvelle.
“Mais quoi ! c’est trop chanté, il faut tourner les yeux,
Eblouis de rayons, dans le chemin des cieux.
C’est fait : Dieu vient régner, de toute prophétie
Se voit la période à ce point accomplie.
La terre ouvre son sein : du ventre des tombeaux
Naissent des enterrés les visages nouveaux :
Du pré, du bois, du champ, presque de toutes places
Sortent les corps nouveaux et les nouvelles faces.
Ici les fondements des châteaux réhaussés
Par les ressuscitants promptement sont percés ;
Ici, un arbre sent des bras de sa racine
Grouiller un chef vivant, sortir une poitrine ;
Là , l’eau trouble bouillonne , et puis, s’éparpillant,
Sent en soi des cheveux et un chef s’éveillant.
Comme un nageur venu du profond de son plonge,
Tous sortent de la mort comme l’on sort d’un songe.
Les corps par les tyrans autrefois déchirés
Se sont en un moment en leurs corps asserrés,
Bien qu’un bras ait vogué par la mer écumeuse
De l’Afrique brûlée en Thulé froiduleuse.
Les cendres des brûlés volent de toutes parts ;
Les brins, plutôt unis qu’ils ne furent épars,
Viennent à leur poteau, en cette heureuse place,
Riant au ciel riant, d’une agréable audace.”
(Les Tragiques, VII)