Un débat se déroulera à l’Université de Caen dans le cadre de « la Fête de la science 2005 ». Edmond Goubet (biologiste), Jean-Claude Dumoncel (philosophe) et le P. Maurice Morand (théologien) se demanderont avec Christophe Goupil (physicien) si « l’investigation scientifique épuise le réel » à l’occasion 14ème édition de la Fête de la Science du 10 au 16 octobre 2005.
La théologie doit-elle se mêler de questions scientifiques ?
P. Maurice Morand : Il y a une affinité profonde entre théologie et la rationalité. Le débat avec les diverses méthodologies, hypothèses et théories scientifiques est donc utile à la théologie, qui vérifie ainsi la pertinence intellectuelle de ses propres démarches.
Mais quelle bénéfice peut tirer la théologie d’une rencontre avec les dernières découvertes de la physique, par exemple ?
P. Maurice Morand :La théologie trouve dans le dialogue avec les scientifiques d’aujourd’hui, par exemple, la remise en cause radicale de concepts métaphysiques que l’on opposait à la théologie chrétienne comme le concept de Matière. Aujourd’hui ce concept, sur lequel s’appuyait un certain matérialisme, n’est plus un concept opératoire dans l’élaboration d’une théorie physique. Par conséquent, l’idée d’une éternité de la Matière est abandonnée par les physiciens aujourd’hui. Ce qui ne préjuge pas de la possibilité d’une pluralité indéfinie d’Univers passant par des phases d’expansion et de contraction.
A l’opposé, nous devons nous garder d’estimer que l’évolution contemporaine de la physique et des sciences de la Nature est en mesure de confirmer les acquis théologiques auxquels nous sommes parvenus au terme de vingt siècles de christianisme. Il convient de ne jamais confondre les démarches scientifiques, philosophiques et théologiques qui ont chacune leur spécificité, leurs domaines d’étude et leurs méthodes propres.
Quelle bénéfice les sciences, de leur côté, peuvent-elles tirer d’une rencontre avec la théologie ?
P. Maurice Morand : Aucun. Il y a peu de chance que la rencontre des sciences et de la théologie suscitent de nouvelles hypothèses ou de nouvelles théories scientifiques. Ceci étant dit, il demeurera sans doute toujours une inadéquation entre le besoin d’explication, de compréhension, sinon de Sens qui habite les scientifiques comme l’ensemble des hommes et les possibilités d’expliquer effectivement fournies par la science. Ainsi les chercheurs sont-ils confrontés au défi de la limitation ultime de la connaissance scientifique que représentent, par exemple, pour rester dans le domaine des science sphysiques, la vitesse de la lumière, la constante de Planck etc.
Les sciences se heurtent lorsqu’elles vont jusqu’au bout de leurs investigations à un « inconnu » qui se présente comme définitivement irréductible. Surgit donc une question de Sens : pourquoi cette limitation de l’effort scientifique ? La nouvelle modernité à l’uvre dans les sciences contemporaines semble donc requalifier humainement les questions du Sens et manifester que les recherches des philosophes et des théologiens ont leur légitimité.