Ce qui définit le chrétien, c’est être attaché à la personne de Jésus-Christ, en qui nous reconnaissons notre Dieu qui se fait proche et qui nous sauve. Catéchèse de Mgr Pascal Roland.
La semaine passée, j’ai rencontré plusieurs personnes qui se disaient « croyantes ». J’ai été touché par le fait que les uns et les autres concevaient la foi chrétienne comme une morale. Pour eux, être chrétien, c’est être attaché à certaines valeurs, qui commandent une façon de vivre.
Cette manière de voir les choses est belle et généreuse, mais, être chrétien, ce n’est pas cela ! Ce qui définit le chrétien, ce n’est pas l’attachement à une morale. C’est – comme la formation du nom en témoigne – être attaché à la personne de Jésus-Christ, en qui nous reconnaissons notre Dieu qui se fait proche et qui nous sauve.
Etre chrétien, c’est, croire en Jésus. Non pas croire, dans le sens de “formuler une opinion à son sujet”, mais dans le sens de lui faire confiance. C’est le choisir librement comme maître, Seigneur, ami et guide. C’est choisir d’avoir partie liée avec lui et accepter de marcher à sa suite, parce qu’il est celui qui nous ouvre le chemin de la vie.
L’enjeu de la semaine sainte et du temps pascal réside précisément dans cet attachement à Jésus et cet engagement à le suivre.
Le Christ, maître de la vie.
Tout d’abord, le dimanche des Rameaux, nous avons célébrés l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem. Nous avons brandis des rameaux pour l’accueillir et l’acclamer. Ces rameaux toujours verts sont un signe de vie et d’espérance, au moment où Jésus aborde sa Passion. Nous avons manifesté que cette entrée est annonciatrice de sa victoire : nous célébrons déjà la victoire de l’Amour ! Le triomphe de celui qui a vaincu la mort, en écrasant le péché et la haine. Ainsi se trouve manifestée l’unité profonde du Mystère Pascal. Passion, mort et Résurrection sont indissociables et constituent les divers aspects d’une seule et même réalité : le Salut donné par Jésus Christ.
Un engagement à le suivre
En acclamant Jésus, en saluant l’Envoyé de Dieu et le Sauveur, nous signifions que nous faisons Corps avec lui. En d’autres termes, nous manifestons notre engagement à le suivre sur le Chemin qu’il nous ouvre, le chemin de la Résurrection et de la Vie.
En acclamant Jésus, nous prenons déjà part à sa victoire. Et par conséquent, nous consentons à emprunter le chemin qu’il nous indique pour participer à sa Résurrection, pour être victorieux avec lui. Nous acceptons de porter avec amour toutes les croix de nos vies, les petites et les grandes, les croix que nous n’avons pas choisies et pour lesquelles nous sommes réquisitionnés, tel Simon de Cyrène. Nous choisissons de dire oui et de ne pas nous dérober, avec celui qui ne fuit pas devant sa Passion, parce qu’il a décidé d’aimer jusqu’au bout.
Un signe d’Espérance
En rentrant chez nous, nous avons accroché ces rameaux verts sur les crucifix de nos maisons. Nous irons peut-être en porter sur les tombes de nos défunts. Chaque fois que nous reverrons ces rameaux, ils nous rappelleront la victoire du Crucifié. Ainsi, nous pourrons nous rappeler notre acclamation du dimanche des Rameaux et notre engagement à suivre Jésus toujours et partout, pour avoir pleinement part à sa victoire et connaître la vie éternelle. Ainsi, nous pourrons nous rappeler que chaque dimanche Jésus nous attend pour le rencontrer à la messe, pour participer au mystère pascal, pour célébrer sa mort et sa résurrection, pour grandir dans la communion avec Lui, et ainsi dans la communion les uns avec les autres.
Le récit de la Passion
Le récit de la Passion nous fait vivre un long chemin, où nous suivons pas à pas le don que Jésus fait de lui-même. Le Christ nous achemine ainsi jusqu’au calvaire et nous fait entrer avec lui dans le mystère de sa passion et de sa mort, le mystère de notre Salut. Les deux premières lectures et le psaume viennent jeter une lumière qui nous permet de mieux entendre le récit de la Passion. Sous les traits du Serviteur souffrant (Isaïe) on reconnaît Jésus. Il nous est présenté comme celui qui obéit à sa mission, dans la fidélité et la confiance parfaite. ” Le Seigneur m’a ouvert l’oreille et moi je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé ” fait écho au ” Tu ne voulais ni sacrifice ni oblation, tu m’as ouvert l’oreille ; tu n’exigeais ni holocauste ni victime, alors j’ai dit : voici je viens. Au rouleau du livre il m’est prescrit de faire tes volontés. Mon Dieu, je me suis plu dans ta loi, au profond de mes entrailles ” (Psaume 40(39), 7-9). Cette déclaration, l’épître aux Hébreux la relit en l’appliquant au Christ ” entrant dans le monde “(Heb. 10, 5-7). Avec l’épître aux Hébreux, nous reconnaissons que la Passion du Christ n’est pas un événement passif, mais bien le fruit d’une volonté : ” C’est en vertu de cette volonté que nous sommes sanctifiés par l’oblation du corps de Jésus Christ une fois pour toutes “(Heb 10,10)
Le deuxième trait qui frappe, à l’écoute de la prophétie, c’est la foi du Christ, la confiance inébranlable qu’il met dans son Père. Alors qu’il est exposé à la haine, alors qu’il est abandonné de tous et qu’il subit des outrages, Jésus ne remet pas en cause sa confiance dans le Père. Il communie jusqu’au bout à notre condition de pécheurs : il expérimente en sa chair ce que c’est que d’être séparé de Dieu, car il ne connaît plus que le silence du Père (le Père l’accompagne dans le silence, il accepte de ne plus se manifester). Et c’est pourquoi Jésus crie d’une voix forte : ” Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ” avant de s’en remettre totalement au Père en expirant et en s’abandonnant à la mort.
L’épître aux Philippiens resitue la Passion du Christ dans un mouvement plus large. D’une part, elle nous montre comment la mort du Christ est l’accomplissement total d’un mouvement d’obéissance et de dépouillement du Verbe de Dieu. Comment en fin de compte on ne peut pas dissocier l’Incarnation de la Rédemption. D’autre part, elle nous fait saisir qu’on ne peut pas dissocier la mort du Christ de sa Résurrection. C’est dans celle-ci, en effet que se manifeste pleinement la gloire du Christ, sa Seigneurie sur toute la création.