Le Vatican vient de publier le document Redemptionis Sacramentum, consacré à la manière de célébrer la messe. 40 ans après Vatican II, ce document fait un point sur les éléments positifs et négatifs découlant de la réforme liturgique introduite à la suite du Concile.
“Redemptionis Sacramentum, sur certaines choses à observer et à éviter concernant la très Sainte Eucharistie”, le document de la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements, a été présenté vendredi matin 23 avril 2004 au cours d’une conférence tenue près la Salle-de-Presse du Saint-Siège par le Cardinal Francis Arinze et Mgr Domenico Sorrentino, respectivement Préfet et Secrétaire de la Congrégation. Mgr Angelo Amato, SDB, Secrétaire de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, était également présent pour avoir collaboré à la préparation de ce document.
Le document est composé d’une introduction, de huit chapitres et d’une conclusion, soit 186 paragraphes.
Le Chapitre I, “Le gouvernement de la sainte liturgie”, traite du rôle du Siège apostolique, de l’évêque diocésain, de la conférence épiscopale, des prêtres et diacres dans le gouvernement de la liturgie, soulignant l’importance de l’évêque diocésain, Grand Prêtre de son troupeau. Par.22 : “L’évêque dirige l’Eglise particulière, qui lui est confiée, et il lui appartient de régler, diriger, stimuler, parfois même de reprendre, en exerçant la charge sacrée qu’il a reçue par l’ordination épiscopale, pour édifier son troupeau dans la vérité et dans la sainteté”.
Le Par.24 précise: “Pour sa part, le peuple chrétien a le droit d’obtenir que l’évêque diocésain veille à ce que des abus ne se glissent pas dans la discipline ecclésiastique, surtout en ce qui concerne le ministère de la Parole, la célébration des Sacrements et des sacramentaux, le culte de Dieu et des saints”.
Quant aux Conférences épiscopales, le Par.28 explique que : “Toutes les normes relatives à la liturgie, établies par une Conférence des Evêques, selon les normes du droit, pour son propre territoire, doivent être soumises à la Recognitio de la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements, sans laquelle elles n’ont aucun caractère d’obligation”.
En ce qui concerne les prêtres, le Par.31 indique qu’ils “ne doivent pas évacuer la signification profonde de leur propre ministère, en défigurant d’une manière arbitraire la célébration liturgique par des changements, des omissions ou des ajouts”.
Le Chapitre II est intitulé “La participation des fidèles laïcs à la célébration de l’Eucharistie”. Le Par.36 rappelle que : “Le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel ou hiérarchique, bien qu’il y ait entre eux une différence essentielle et non seulement de degré, sont cependant ordonnés l’un à l’autre ; l’un et l’autre, en effet, chacun selon son mode propre, participent de l’unique sacerdoce du Christ”.
Le Par.42 explique que l’on “ne peut pas considérer le Sacrifice eucharistique dans le sens univoque de concélébration du prêtre avec le peuple qui est présent. Au contraire, l’Eucharistie célébrée par les prêtres est un don ‘qui dépasse radicalement le pouvoir de l’assemblée. Pour être véritablement une assemblée eucharistique, la communauté qui se réunit pour la célébration de l’Eucharistie a absolument besoin d’un prêtre ordonné qui la préside. D’autre part, la communauté n’est pas en mesure de se donner à elle- même son ministre ordonné’. Ainsi, il ne faut employer qu’avec prudence des expressions telles que ‘communauté célébrante’ ou ‘assemblée célébrante’, qui sont traduites dans d’autres langues modernes par ‘celebrating assembly’, ‘asamblea celebrante’, ‘assemblea celebrante’, et d’autres de ce genre”.
Quant aux enfants de choeur, le Par.47 précise : “Il est tout à fait louable que se maintienne la coutume insigne que soient présents des enfants ou des jeunes -dénommés habituellement servants d’autel ou enfants de choeur- qui servent à l’autel comme acolytes, et reçoivent, selon leurs capacités, une catéchèse utile, adaptée à leur service. On ne doit pas oublier que, du nombre de ces enfants, qui servent à l’autel, a surgi, au long des siècles, une multitude de ministres sacrés. Afin de pourvoir plus efficacement aux besoins pastoraux de ces servants d’autel, il est nécessaire d’instituer et de promouvoir pour eux des associations, en faisant même appel à la participation et à l’aide de leurs parents. Quand des associations de ce genre acquièrent une dimension internationale, il revient à la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements de les ériger, ou d’examiner et d’approuver leurs statuts. Les filles ou les femmes peuvent être admises à ce service de l’autel, au jugement de l’évêque diocésain; dans ce cas, il faut suivre les normes établies à ce sujet”.
Le Chapitre III, “La célébration correcte de la Sainte Messe” rappelle la composition de l’Eucharistie : “Le saint Sacrifice eucharistique doit être célébré avec du pain azyme, de pur froment et confectionné récemment en sorte qu’il n’y ait aucun risque de décomposition”. Complété par le Par.50 : “Le saint Sacrifice eucharistique doit être célébré avec du vin naturel de raisins, pur et non corrompu, c’est-à-dire sans mélange de substances étrangères”.
Le Par.52 rappelle que “la proclamation de la Prière eucharistique, qui, par nature, est le sommet de toute la célébration, est réservée au prêtre en vertu de son ordination”.
Le Par.59 affirme que “l’usage suivant, qui est expressément réprouvé, doit cesser: ici ou là, il arrive que les prêtres, les diacres ou les fidèles introduisent, de leur propre initiative, des changements ou des variations dans les textes de la sainte Liturgie, qu’ils sont chargés de prononcer. En effet, cette manière d’agir a pour conséquence de rendre instable la célébration de la sainte Liturgie, et il n’est pas rare qu’elle aille jusqu’à altérer le sens authentique de la Liturgie”.
Le Par.62 poursuit : “Il n’est pas licite d’omettre ou de changer arbitrairement les lectures bibliques qui sont prescrites, ni surtout de remplacer ‘les lectures et le psaume responsoriel, qui contiennent la parole de Dieu, par d’autres textes choisis hors de la Bible'”.
L’Instruction précise encore que l’homélie “est faite habituellement par le prêtre célébrant lui-même ou par un prêtre concélébrant à qui il l’aura demandé, ou parfois, si cela est opportun, aussi par le diacre, mais jamais par un laïc”.
Au moment de l’échange du geste de paix qui se fait avant la Communion, le Par.72 dit : “Il convient ‘que chacun souhaite la paix de manière sobre et seulement à ceux qui l’entourent… Le prêtre peut donner la paix aux ministres, en restant cependant dans le sanctuaire, pour ne pas troubler la célébration”.
Ce chapitre se conclut ainsi : “Enfin, il faut condamner très sévèrement l’abus qui consiste à introduire, dans la célébration de la sainte Messe, des éléments contre les prescriptions des livres liturgiques, qui sont empruntés à des rites d’autres religions”.
Le Chapitre IV, “La Sainte Communion”, énonce les dispositions pour communier : “De même, la coutume de l’Eglise affirme qu’il est nécessaire que chacun s’éprouve soi-même, afin que celui qui a conscience d’être en état de péché grave, ne célèbre pas la Messe ni ne communie au Corps du Seigneur, sans avoir recouru auparavant à la confession sacramentelle, à moins qu’il ait un motif grave et qu’il soit dans l’impossibilité de se confesser ; dans ce cas, il ne doit pas oublier qu’il est tenu par l’obligation de faire un acte de contrition parfaite, qui inclut la résolution de se confesser au plus tôt”.
A propos du Sacrement de la Première Communion, le Par.87 précise que “la première Communion des enfants doit toujours être précédée de la confession sacramentelle et de l’absolution. De plus, la première Communion doit toujours être administrée par un prêtre, et elle ne doit jamais être reçue en dehors de la célébration de la Messe”.
A propos de la façon de recevoir la communion, le Document rappelle le choix de recevoir l’hostie soit dans la bouche soit dans la main. Recevoir le Sacrement dans la main est possible “dans les régions où la Conférence des Evêques le permet, avec la confirmation du Siège Apostolique. Cependant, il faut veiller attentivement dans ce cas à ce que l’hostie soit consommée aussitôt par le communiant devant le ministre, pour que personne ne s’éloigne avec les espèces eucharistiques dans la main”.
“Pour administrer la sainte Communion sous les deux espèces aux fidèles laïcs, il faut tenir compte d’une manière appropriée des circonstances, dont l’évaluation revient en premier lieu aux évêques diocésains”. Il est par ailleurs rappelée l’interdiction faite au communiant “de tremper lui-même l’hostie dans le calice, ni de recevoir dans la main l’hostie, qui a été trempée dans le Sang du Christ”.
Au Chapitre V, intitulé “Quelques autres considérations concernant l’Eucharistie”, on rappelle qu’il “n’est jamais permis à un prêtre de célébrer l’Eucharistie dans un temple ou un lieu sacré d’une religion non-chrétienne”. A l’exception des Messes qui doivent être célébrées dans la langue du peuple, “il est permis aux prêtres de célébrer la Messe en latin, en tout lieu et à tout moment”.
A propos ensuite des vêtements liturgiques, on rappelle qu’en dehors du célébrant principal, “qui doit toujours porter la chasuble selon la couleur prescrite, le Missel Romain donne la faculté aux prêtres qui concélèbrent la Messe, ‘de ne pas revêtir de chasuble, en prenant l’étole sur l’aube’, en présence d’une juste cause, comme par exemple, le nombre plutôt élevé des concélébrants et le manque d’ornements. Cependant, si on peut prévoir une situation de ce genre, on doit, autant que possible, pourvoir à ce manque d’ornements'”.
“La réserve eucharistique et le culte de l’Eucharistie en dehors de la Messe” est le titre du Chapitre VI. “Le Saint-Sacrement doit être conservé dans un tabernacle placé dans une partie de l’église particulièrement noble, insigne, bien visible et bien décorée.. Le fait d’emporter ou de conserver les espèces consacrées à des fins sacrilèges, de même que le fait de les jeter à terre, constituent des actes entrant dans la catégorie des Graviora Delicta, dont l’absolution est réservée à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi”.
L’Instruction indique qu’il “faut promouvoir avec ardeur la dévotion, tant publique que privée, envers la très sainte Eucharistie, y compris en dehors de la Messe, afin que les fidèles rendent un culte d’adoration au Christ vraiment et réellement présent”.
Le Chapitre VII, “Les fonctions extraordinaires des fidèles laïcs” rappelle en particulier qu’il “n’est jamais permis aux laïcs d’assumer les fonctions du diacre ou du prêtre, ou de revêtir les vêtements qui leur sont propres, ni d’autres vêtements semblables”.
On lit ensuite que “le ministre extraordinaire de la sainte Communion ne peut donner la Communion que dans le cas où le prêtre ou le diacre font défaut, lorsque le prêtre est empêché à cause d’une maladie, du grand âge ou pour un autre motif sérieux, ou encore lorsque le nombre des fidèles qui s’approchent de la Communion est tellement important que cela risquerait de prolonger la célébration de la Messe d’une manière excessive”.
A propos de la prédication, on rappelle que “l’homélie est, par nature et du fait de son importance, réservée au prêtre ou au diacre pendant la Messe”. Là où existe un problème pour célébrer la Messe dominicale dans une église, il revient à l’évêque diocésain de “remédier à cette situation, en union avec son presbyterium. Parmi les solutions susceptibles d’être retenues, les principales doivent être les suivantes : faire appel à d’autres prêtres disponibles pour célébrer la Messe, ou demander aux fidèles de se rendre dans l’église d’un lieu proche”.
“Si, faute de ministre sacré ou pour toute autre cause grave, la participation à la célébration eucharistique est impossible”, l’évêque doit veiller à ce que la communauté “ait une célébration, qui doit être organisée sous sa propre autorité et selon les normes de l’Eglise”. Toutefois, ces célébrations seront toujours considérées comme ayant “un caractère absolument extraordinaire”, car “il faut éviter avec soin toute forme de confusion entre des réunions de prières de ce genre et la célébration de l’Eucharistie”.
On lit ensuite qu’on “ne peut envisager de remplacer la sainte Messe dominicale par des célébrations ocuméniques de la Parole, ou par des rencontres de prières avec des chrétiens appartenant aux.Communautés ecclésiales, ou par la participation à leur service liturgique”.
Au clerc qui a perdu l’état clérical, “il n’est pas permis de célébrer les Sacrements pour quelque raison que ce soit, hormis seulement dans le cas exceptionnel prévu par le droit; de même, les fidèles ne sont pas autorisés à recourir à lui pour la célébration, en l’absence d’une juste cause déterminée par le canon 1335”.
Au Chapitre VIII, qui traite des “Remèdes”, Il est rappelé que parmi les différents abus, “il y a ceux qui constituent objectivement, d’une part, les Graviora Delicta, d’autre part, les matières graves, et d’autres encore qui doivent tout autant être évités et corrigés avec attention”.
Les Graviora Delicta contre la sainteté du Sacrifice et Sacrement de l’Eucharistie doivent être traités selon les Normes concernant ces délits réservés à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, à savoir : a) l’action d’emmener ou de conserver à des fins sacrilèges les espèces eucharistiques, ou de les jeter ; b) le fait d’attenter, sans être prêtre, une célébration liturgique du Sacrifice eucharistique, ou de la simuler ; c) la concélébration du sacrifice eucharistique, malgré l’interdiction, avec des ministres de Communautés ecclésiales qui ne possèdent pas la succession apostolique et ne reconnaissent pas la dignité sacramentelle de l’ordination sacerdotale ; d) la consécration à des fins sacrilèges d’une matière sans l’autre dans la célébration eucharistique, ou même des deux en dehors de la célébration eucharistique.
Il est ensuite signalé que tout ce qui est exposé dans la présente Instruction “ne se rapporte pas à toutes les violations contre l’Èglise et sa discipline, qui sont définies dans les canons, dans les lois liturgiques et dans les autres normes de l’Eglise, selon la doctrine du Magistère ou la saine tradition. Là où un mal quelconque est commis, il doit être corrigé en suivant les normes du droit”.
L’évêque diocésain, devant “défendre l’unité de l’Eglise tout entière, est tenu de promouvoir la discipline commune à toute l’Eglise et en conséquence il est tenu de vérifier l’observation de toutes les lois ecclésiastiques. Il veillera à ce que des abus ne se glissent pas dans la discipline, surtout en ce qui concerne le ministère de la Parole, la célébration des sacramentaux, le culte de Dieu et des saints”.
“Les délits contre la foi, ainsi que le Graviora Delicta commis au cours de la célébration de l’Eucharistie et des autres Sacrements, doivent être déférés sans tarder à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, qui les ‘juge et, en l’occurrence, déclare ou inflige les sanctions canoniques selon les normes du droit commun ou du droit propre’. Chaque fois que la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements a connaissance, au moins vraisemblable, d’un délit ou d’un abus commis à l’encontre de l’Eucharistie, elle en informe l’Ordinaire, afin que celui-ci fasse une enquête sur le fait”.
“Tout catholique, qu’il soit prêtre, diacre ou fidèle laïque, a le droit de se plaindre d’un abus liturgique, auprès de l’Èvêque diocésain ou de l’Ordinaire compétent équiparé par le droit, ou encore auprès du Siège Apostolique en raison de la primauté du Pontife Romain. Cependant, il convient, autant que possible, que la réclamation ou la plainte soit d’abord exposée à l’évêque diocésain. Cela doit toujours se faire dans un esprit de vérité et de charité”.
En conclusion, le Cardinal Arinze et Mgr Sorrentino, qui ont signé le Document, souhaitent que, “grâce à l’application attentive des normes rappelées dans la présente Instruction, l’action du très saint Sacrement de l’Eucharistie rencontre moins d’obstacles dus à la fragilité humaine, et que, si l’on parvient à écarter tout abus et à bannir tout usage illicite, par l’intercession de la Bienheureuse Vierge Marie, la Femme eucharistique, la présence salvifique du Christ resplendisse sur tous les hommes dans le Sacrement de son Corps et de son Sang”.