Madeleine Delbrêl est née en 1904 à Mussidan , en Dordogne dans la maison de ses grands-parents maternels. Elle s’est éteinte en 1964 à Ivry où elle est enterrée.
Madeleine Delbrêl est née en 1904 à Mussidan , en Dordogne dans la maison de ses grands-parents maternels. Elle s’est éteinte en 1964 à Ivry où elle est enterrée.
En 1993, Monseigneur Frétellière, évêque de Créteil, introduit la « cause de béatification de Madeleine Delbrêl », première étape vers la reconnaissance de la sainteté.
Découvrons cette femme hors du commun qui a choisi Dieu en vivant auprès des exclus et des miséreux et en incarnant le silence dans la ville.
1904 – hiver 1924 : de son enfance à la grande rencontre
Madeleine Delbrêl naît dans une famille très modeste du Sud-Ouest en 1904.
Son père, cheminot, titre que Madeleine revendiquait volontiers, n’était pas un homme ordinaire : passionné par son métier, excellent organisateur, patriote ardent, il était aussi ami des lettres et poète à ses heures.
Madeleine fera ses classes par leçons particulières, « de façon un peu archaïque » dira-t-elle. Il en est de même au plan religieux. Elle est formée non dans sa famille où l’on était très indifférent, mais lors de leçons particulières. Elle rencontre dans son enfance des prêtres qui savent éveiller en elle une foi simple et profonde. Elle fait sa première communion à douze ans. Mais Madeleine, très vite soumise à d’autres influences, ne devait pas rester croyante. En particulier elle fut influencée par un ami de ses parents, le docteur Armaingaud, « disciple de Littré, athée convaincu ». Madeleine dit de cette période : « Si des gens exceptionnels m’avaient donné de sept à douze ans l’enseignement de la foi, d’autres gens non moins exceptionnels me donnèrent ensuite une formation contradictoire. A quinze ans j’étais strictement athée et je trouvais chaque jour le monde plus absurde. »
A la fin de l’hiver 1924, Madeleine rencontra une bande de jeunes pleins d’entrain. « Ils n’étaient ni plus vieux, ni plus bêtes, ni plus idéalisés que moi, c’est -à-dire qu’ils vivaient la même vie que moi, discutaient autant que moi, dansaient autant que moi.
Ils parlaient de tout mais aussi de Dieu qui paraissait leur être indispensable comme l’air. »
Madeleine était toute prête à recevoir son premier indice de l’existence de Dieu de la part de gens rencontrés dans la vie de tous les jours. Elle observa attentivement, et d’un oeil critique, ces témoins de l’existence de Dieu. Après des mois de débats et de discussions passionnées, Madeleine admit : « Je ne pouvais plus honnêtement laisser Dieu dans l’absurde
». Madeleine choisit alors ce qui lui paraît le mieux traduire son changement de perspective : elle décide de prier. Pendant ces jours de prière intense Madeleine a moins l’impression de trouver Dieu que d’être trouvée par Lui.
De cette recherche, Madeleine garde existentiellement le sens du don de la foi, la certitude d’un trésor extraordinaire et absolument gratuit. Elle avait d’ailleurs l’habitude de dire que Dieu lui avait fait don de la foi à travers ses contacts humains .
Cette rencontre de l’amour inconditionnel de Dieu et de son amitié, marque l’achèvement d’une recherche longue et terrifiante. Madeleine ne cherche plus à se saisir de Dieu ou à le définir, puisqu’elle peut maintenant l’aimer comme un être infini et inexprimable.
Madeleine n’a cessé, de vingt à soixante ans, d’être une convertie et une « éblouie de Dieu »
La vocation de Madeleine : choisir la vie
Choisir la vie, et la vie pour Dieu, ainsi que le don de soi-même à l’amour de Dieu, sont devenus la vocation de Madeleine. Il lui faut trouver la meilleure façon de la vivre.
Elle pense rentrer au Carmel. Avec sa soif d’absolu et sa nature contemplative, Madeleine s’y sent fortement attirée.
Si Madeleine est sûre d’être appelée à la vie contemplative, elle comprend qu’en ce qui la concerne, elle doit la vivre dans le monde, comme une simple chrétienne laïque. En 1927, après des jours de réflexion, de prière et de d’épreuve, Madeleine est certaine de faire la volonté de Dieu en restant à travailler pour lui dans le monde. C’est donc en pleine vie laïque qu’elle s’oriente.
Son cri de ralliement n’est plus comme autrefois: « Dieu est mort, vive la mort ! » mais : « Dieu est vivant, vive la vie ! ». Chaque minute de la vie prend une importance singulière. Même la vie quotidienne voit sa monotonie se transformer en splendeur invisible.
L’annonce de l’Evangile ne cesse d’accompagner partout Madeleine.
Vivre librement et publiquement en plein monde la Bonne Nouvelle.
L’amour du prochain – la vie missionnaire
En 1929, la crise économique gagne la France et Paris est submergé de problèmes tant sociaux que moraux et politiques.
Madeleine a mille occasions de se rendre utile. Madeleine court vers ceux qui ont le plus besoin d’aide. Ces démarches mettent Madeleine en contact direct avec la misère et les souffrances d’autrui. Plus que jamais, le « don gratuit de la foi » n’est pas une simple image, mais une foi sur une route qui l’entraîne vers les autres.
Madeleine continue à écrire des poèmes. Les titres reflètent ce que fait Madeleine, son regard attentif sur les autres, et ce en quoi elle croit : « Seigneur de la chair ravagée », « Cette rue où vous marchez », « Seigneur d’ici et maintenant », « Seigneur des sans-le-sou » Dans ses précédents poèmes, Madeleine reconnaissait avoir regardé les autres sans vraiment les voir. Maintenant qu’elle contemple les l’expression des yeux et des visages , la rue devient pour elle son église et son cloître.
Ce regard de compassion sur le monde devait s’amplifier et s’approfondir. Dans ce but Madeleine rassemble un groupe de jeunes femmes, pour réfléchir ensemble sur l’Ecriture sainte. Elle le fait, tout en sachant que dans l’Eglise catholique d’alors, de telles lectures étaient généralement considérées comme l’apanage des clercs, pour éviter que les laïcs ne fassent des interprétations erronées. Ces rencontres hebdomadaires leur permettent de discerner le sens de la Parole de Dieu dans leur vie.
Dans ce groupe d’une douzaine de femmes, plusieurs se sentent appelées à mener une vie contemplative hors les murs d’un couvent. Elles ont l’idée de vivre en petite communauté, menant une vie chrétienne contemplative au cur du monde. Le prêtre qui accompagne le groupe, le Père Lorenzo, appuit leur désir de rester des laïques ordinaires.
Avant de s’installer à Ivry en 1933, le groupe définit leur but : leur vie devait être , au sens le plus vrai, une vie contemplative fondée sur l’Evangile, et vécue au cur du monde.
Le groupe croit qu’il est essentiel d’annoncer l’Evangile non par des paroles, mais par la vie. Elles se sentent appelées à vivre simplement l’Evangile et ne veulent pas se faire accaparer par les tâches paroissiales.
La maison d’Ivry est une vraie maison de famille où peuvent se rencontrer des gens très divers, appartenant aux milieux et aux idéologies les plus variés. Chacun se sent là « chez soi », parce qu’il est compris pour ce qu’il est et parce qu’il y trouve une atmosphère de partage.
A Ivry, Madeleine travaille avec les communistes mais elle y découvre un jour une divergence majeure. Si le communisme s’intéressait à la classe ouvrière, c’était à l’exclusion de toutes les autres classes sociales. Or même si l’Evangile propose d’aimer en priorité les plus pauvres et les plus rejetés, il proclame en même temps l’amour universel de tous les êtres humains, quelles que soient leur richesse matérielle ou leur position sociale. Madeleine écrit : « Le Christ n’a condamné aucun homme parce qu’il était banquier ; le Christ a condamné tout homme qui juge un autre homme ».
Le silence dans la ville
« Nous autres, gens de la rue, croyons de toutes nos forces que cette rue, que ce monde où Dieu nous a mis est pour nous le lieu de notre sainteté.»
« Il n’y a pas de solitude sans silence. »
« Le silence, c’est quelquefois se taire, mais c’est toujours écouter. »
« Une absence de bruit qui serait vide de notre attention à la parole de Dieu ne serait pas silence. »
« Une journée pleine de bruit, et pleine de voix peut être une journée de silence si le bruit devient pour nous écho de la présence de Dieu, si les voix sont pour nous messages et sollicitation de Dieu. »
« Le silence est charité et vérité. »
« A nous gens de la rue, il semble que la solitude n’est pas l’absence du monde mais la présence de Dieu. C’est de le rencontrer partout qui fait notre solitude. »
—
Sources
Nous autres, gens des rues, Madeleine Delbrêl, Ed. du Seuil, 1966-1971
Le silence dans la ville, Madeleine Delbrêl,
Madeleine Delbrêl, Une vie sans frontières, Charles F. Mann, Ed. DDB, 2002
En savoir plus et goûter intérieurement
Prier 15 jours avec Madeleine Delbrêl, Bernard Pitaud, Ed. Nouvelle Cité, 1998.
La joie de croire, Madeleine Delbrêl, Ed. du Seuil, 1968
Alcide. Guide simple pour simples chrétiens, Madeleine Delbrêl, Ed. du Seuil, 1980-1995
http://catholiques-val-de-marne.cef.fr/decouverte/mdelbrel/index.htm
http://catholiques-val-de-marne.cef.fr/maddelbrel