En juillet dernier, Soeur Constance a reçu la consécration dans la vie érémitique. Elle nous parle de sa vocation.
(Voir aussi : Les ermites et les veuves consacrées)
Sœur Constance, comment est née et a grandi cette vocation à la vie d’ermite ?
Très tôt, j’ai su que j’étais Marie et non pas Marthe, mais cela n’impliquait pas la vie religieuse. Ce n’est qu’étudiante que l’appel à me consacrer à Dieu s’est précisé. J’ai une tante qui est ermite et je disais au Seigneur : « La vie religieuse, d’accord, mais pas comme ma tante ermite ». Il ne faut jamais dire ce genre de chose au bon Dieu !
Au départ, j’ai pensé au Carmel. Je suis allé voir une amie qui y était entrée. Mais j’ai tout de suite compris que ce n’était pas pour moi : j’avais l’impression d’étouffer. Mon père spirituel m’a proposé de faire une retraite en ermitage, et si dans un premier temps je n’étais pas convaincue, cela s’est imposé comme une évidence. Il est vrai que je suis déjà une solitaire. Je suis donc allée dans une laure, c’est-à-dire un lieu regroupant plusieurs ermitages autour d’une chapelle, dans les Hautes-Alpes. L’évêque du lieu m’a demandé de suivre une formation à la vie religieuse, et cela ne pouvait se faire que dans le cadre d’une vie communautaire. C’est ainsi que j’ai rejoint le noviciat des sœurs contemplatives de Saint-Jean.
Mais vous n’êtes pas restée dans cette communauté ?
À l’époque cette communauté laissait une grande place à la vie en cellule, donc à une certaine solitude ; cela m’a séduit, ainsi que leur liturgie. Il y avait surtout une grande charité fraternelle qui m’a beaucoup aidée. Mais petit à petit, il est apparu évident que je n’étais plus à ma place. J’aspirais à plus de solitude et la communauté des sœurs de Saint-Jean évoluait vers plus de vie commune. Dans un premier temps, j’ai eu la permission de quitter la communauté pour chercher un lieu pour vivre cette vie d’ermite à laquelle j’aspirais.
La prieure générale des Sœurs de Saint-Jean, qui était toujours ma supérieure, a contacté Mgr Brincard qui a accepté, après l’accord de son Conseil, de me recevoir comme ermite dans son diocèse. Avec le Père Harrouet nous avons rédigé des statuts qui précisent les différents aspects de ma vie (pour une communauté c’est la Règle et les Constitutions) et c’est ainsi que me voici parvenue à cette consécration. Que de chemin parcouru depuis 1993 !
Comment présentez-vous cette vocation à la vie d’ermite ?
L’ermite est une religieuse contemplative avec une exigence plus grande de solitude.
D’un certain côté, je mène une vie tout ce qu’il y a de plus normale : comme tout le monde, je me lève le matin, je travaille, je fais mes courses, le ménage… rien de très extraordinaire dans tout cela. C’est quelque chose qui diffère déjà de ce qui se passe dans une communauté où l’on est beaucoup plus pris en charge quant aux choses matérielles… Rien de tel dans ce que je vis : je dois me débrouiller seule avec les tracas administratifs et la gestion du quotidien ; je dois aussi me démener pour trouver du travail. Pour être ermite, il faut avoir les pieds sur terre. On ne vit pas sur un petit nuage.
Mais toutes ces tâches de la vie courante, j’essaie de les vivre dans une profonde union à Dieu. Je laisse une grande place à l’oraison et àla Parolede Dieu…
Ermite, cela veut dire que vous ne rencontrez jamais personne ?
Je ne provoque pas les rencontres, mais je ne refuse pas les contacts… La vocation érémitique est avant tout un appel à vivre caché, à accepter de n’être rien, aux yeux du monde tout au moins, à être enfoui dans la solitude au profit d’une vie plus intense avec le Seigneur. Mais cela demande aussi un grand sens des réalités. J’essaie d’être un signe.
Comment a été compris votre engagement autour de vous ?
La vie religieuse contemplative communautaire n’est déjà pas bien comprise, alors la vie érémitique ! Certains membres de ma famille ont très bien compris ce que je veux vivre, d’autres moins.
Comment s’est déroulée la célébration ?
Le rituel est à peu près le même que celui des vœux des religieuses en communauté. Rien n’est expressément prévu pour la consécration d’une ermite, alors nous avons un peu adapté. C’est l’évêque qui préside la cérémonie et qui reçoit mes vœux : ce que je vis est une mission confiée par l’Église, la mission de la prière.